30 juin 2011

Joaquín Moreno de Silva et Millas




C’est Javier, de Toro, torero y afición, qui les présente ces novillos de Joaquín Moreno de Silva qui seront combattus à Millas en août et qui ont fait fuir 26 novilleros.
Vous constaterez qu’il s’agit de novillos d’allure très normale, on va dire, quoique visiblement bien roulés. Les photos sont de février. Rien de terrifiant question armures, mais ça devrait sortir assez fort. Ce sont ces animaux qui vont nous faire rouler quelques kilomètres de plus, dans l’espoir de les voir étaler toute leur caste. En croisant les doigts pour que, dans le lot, se trouve un nouveau 'Diano'.
Cette anecdote, finalement, est un joli puyazo à tous ces cireurs pompes, ces Oui-Oui à la plage de la critique taurine qui se plaisent tant à pointer du doigt une branche de l’Afición accusée de vouloir des éléphants avec des cornes. Il faut dire que c’est tellement facile d’accuser son chien d’avoir la rage lorsque l'on veut s’en débarrasser.
Et Javier de rappeler que les novilleros qui feront le paseo s’appellent Pedro Carrero, Javier Jiménez et José Arévalo. Pour rebondir sur ce que disait Fabrice dans un récent commentaire, il serait sans doute opportun de les faire saluer à l’issue du paseo...

29 juin 2011

Escolar Gil en Céret : ¡Sí!


Inutile de s’en cacher, nos pensées se faisaient sombres à l’idée de la disparition de la corrida d’Escolar Gil du Céret de Toros 2011. Et puis, il y a quelques minutes, la lumière fut. Ça vient de tomber, officiel, la corrida d’Escolar Gil sera bien présente à Céret.

Nous reprenons tous des couleurs !

Corrida de Escolar Gil en Céret, con novillada de Joaquín Moreno de Silva por la mañana, todo un lujo.
Ojalá...

Photographie © José 'JotaC' Angulo

27 juin 2011

Javi


Entre les 26 branleurs de Millas et la dizaine d'apprentis apeurés par les pointes, force est de constater que le "jeune" n'a pas été à la fête ces jours-ci sur CyR. Passons un coup de fil à Céret et Parentis, on pourra rallonger la liste d'exemples pénibles, j'en suis persuadé ! (Non, j'appelle pas Klein, il va me pondre deux pages !!)
Alors le "jeune" ? C'est un branleur, par définition, parce que les filles, elles, veulent pas et qu'il sait pas trop y faire, enfin, il y a 15 ans de ça, c'était mon cas. Passons... Il y a 15 ans, j'avais vu trois tientas maximum chez Yonnet, je n'avais pas eu la chance d'aller chez Cuadri (quoi, encore ?! ben oui, pardi !). 
Parce que les vaches qui chargent 28 fois, OK... Le mayoral qui parle âcre dans sa fumée avec des critères pas croyables, OK... La famille avec l'afición dans le coeur et le coeur sur la main, OK... L'Urcola, le Santa Coloma, le "Comeuñas" parsemé de galets, OK, OK, OK !! Encore ? Oui, mille fois merci, j'arrive...
Mais non, rassure-toi, ô jeune qui passe par là les yeux cernés et le poignet fatigué de ta session d'onanisme par youporn inspirée ce soir, c'est un être plein de compassion qui va te raconter une belle histoire dont tu es le héros. 
Nous tientions alors en ce début mai chez Cuadri, dans la lumière mielleuse de fin de journée, dans les herbes claires. Nous tientions, dans le respect, la simplicité et le sérieux sans chichi. Nous tientions dans le bonheur liquide... Enfin, quand je dis que nous tientions... évidemment nous ne faisions pas grand-chose, nous autres, à part regarder, photographier, changer les péloches, changer de poste, etc. Après les trois inconnus professionnels qui se sont succédés ce soir-là, passaient des jeunes de l'école taurine de Huelva, et quand 'Berreona' eut fini d'écoeurer un Rafael de Julia (je crois) incapable de trouver la mesure, la distance et le reste, mais soucieux de ne pas trop perdre le sitio et la confiance, nous avons tous pensé que la tienta s'en tiendrait là. 'Berreona' était un morceau de vache, prenant trouze-mille piques et posant des difficultés à la muleta. On n'a pas proposé aux jeunes, on allait boucler, quand Javi est arrivé en demandant la permission. Javi avait toréé l'une des vaches précédentes, et comme la plupart de ses copains, il avait montré pas mal de décision, de volonté, et l'envie de ne pas en laisser une miette. Alors Javi s'est planté là, face à 'Berreona', et à force d'insister, l'a fait passer à gauche, mais aussi à droite à force de se planter devant dans un valeureux numéro de porfia. Javi a mis du temps et de la sueur et plein d'autres choses... La famille Cuadri, incrédule puis séduite, a salué la prestation sans ménager ses encouragements : "¡Bien Javiii! ¡Bieeeen!". Le matador desconfiado semblait moins sincère dans les siens. Cosas de toros
A la fin de la tienta, nous avions vu le soleil mielleux, les herbes folles, 'Berreona' et des piques, et des critères. Nous avons aussi vu Javi prouver qu'il était à la hauteur des exigences maison. Le grand bonheur !

26 juin 2011

Légendes anciennes


Hier, samedi 25 juin, devait être combattue à Zamora une corrida de Palha, mais les vétérinaires ont émis un avis contraire. Ils ont écarté les toros portugais pour un manque flagrant de trapío. Fatalitas ? Non. Comment ne pas s'interroger devant les errements réguliers d'un élevage irrégulier devenu un véritable melting pot incontrôlé. D'un côté Pinto Barreiros, Isaías y Tulio Vázquez, Oliveira Irmãos, Torrealta et, de l'autre, Baltasar Ibán, autrement dit du Contreras — là aussi un cocktail assez varié. C'était autrefois, il y a peu, un mélange détonnant. Du TNT, demandez à Israel Lancho. Maintenant, il semble que même un test ADN ne suffirait plus à reconstituer un arbre généalogique complexe dont certaines branches sont mortes et d'autres sont en train d'être sciées. La scie, voilà un instrument qu'il vaut mieux ne pas évoquer en présence de ces toros, quand on songe à l'état de certaines de leurs cornes. C'est comme parler de corde dans la maison d'un pendu : un véritable manque de savoir-vivre. Dorénavant, le fer lui-même semble participer de cette logique : P+. On dirait le résultat d'une analyse sanguine.

— Tu es de quel groupe, toi ?
— P+, pourquoi ?... Toi aussi ? 
— Non, c'est juste pour savoir... au cas où ! 

Trois élevages uniques, trois, pas un de plus. Trois familles ganaderas, trois, pas une de plus. Uniques depuis l'origine. Plus de 150 ans d'existence. Miura (1842), Palha (1848) et Yonnet (1859). Toutes indirectement liées. Les liens du sang de toro : du Miura chez Palha, du Pinto Barreiros chez Yonnet. L'Espagne, le Portugal et la France, tout un panorama taurin. Un patrimoine ? Monsieur Folque, Palha est un fer mythique qu'il serait urgent de réhabiliter.

>>> Pour compléter cet argumentaire, "3 illustrations 3" et un commentaire paru dans le numéro 57 de la revue La Lidia du 27 avril 1917.

L'élevage de Palha
Cet ancien élevage portugais, composé à partir de toros et de vaches de pure race espagnole, est désormais l'un des plus réputés. 
En 1883, lorsque D. José Palha, si célèbre aujourd'hui, pense créer son élevage, il introduit, dans un premier temps, des toros de Miura dans son cheptel de vaches portugaises. Plus tard, en incorporant à son troupeau une "pointe" de vaches achetées au Duc et trois étalons de Jacinto Trespalacios, il obtient une lignée distincte, au sang résolument Veragua, qui lui permet d'ajouter de la bravoure et de la noblesse à la puissance des Miura. 
Le malheureux accident dont furent victimes Algabeño et Lagartijo, tous deux blessés à Madrid par le même animal, a donné l'occasion au banderillero Moyano de colporter une rumeur qui a grandi comme boule de neige entre les toreros. Les maestros ont acquis la certitude que ce toro avait déjà été toréé alors que les faits rapportés ont été démentis et que rien n'accrédite ces affabulations, mais il reste toujours quelque chose de toute calomnie. Depuis, les toreros ont pour cette prestigieuse devise une méfiance injustifiée. En réalité, le toro incriminé ne fut même pas éprouvé car, des 72 bêtes que comptait la camada, 11 seulement le furent, un des veaux mettant un terme à la tienta après avoir fracturé la clavicule du picador.
La preuve de l'intérêt que porte le public à cet élevage réside dans le nombre de bêtes, 98, combattues pendant la saison 1916 dans les arènes de Barcelone, Valence, Vista Alegre, Badajoz, Logroño, Palma de Majorque... Nobles et braves dans l'ensemble, offrant de nombreux triomphes aux toreros, elles ont gommé un peu de la légende noire des Palha. Grâce à l'extrême attention que D. José porte à son élevage, prenant en compte les désirs des matadors, il est parvenu à réduire le volume de ses bêtes, à diminuer la taille de leurs cornes, à leur donner une allure plus agréable et à les doter d'une excellente bravoure.
Un toro cependant mérite une mention spéciale, celui combattu et tué par Larita à Valence le 21 mai. C'était un véritable toro de bandera, de ceux qui font honneur à leur devise.
Il a reçu 9 piques, toujours en chargeant. Il a tué 4 chevaux. Il a causé 7 chutes, renversant le castoreño à chaque reprise, mais le plus incroyable est qu'il a pris la dernière puya sans rechigner, alors que le picador Aragonés avait brisé sa hampe, enfonçant 77 cm de bois qui sont restés dans son corps, jusqu'à la mort. […] 
La Lidia, 27 avril 1917.

Trois photos prises aux corrales dans une situation similaire. Entre la première et la dernière... 95 ans.
1. 'Listo', toro  de Palha, 11 juin 2011, Vic-Fezensac © José Angulo / www.camposyruedos.com
2. 'Sardinero', toro  de Palha, 27 septembre 2009, Las Ventas, Madrid © Juan 'Manon' Pelegrín, que vous pouvez retrouver ici, et encore ailleurs.
3. 'Comisario', novillo de Palha, 1916, Vista Alegre, Madrid © Baldomero

Photographie sans paroles (LVIII)


25 juin 2011

26 petits branleurs



C'est l'hebdomadaire Semana Grande qui donne l'information dans son numéro 742.

Avant de trouver les trois novilleros qui ont accepté de se mettre devant la novillada de Joaquín Moreno de Silva qui sera combattue en août prochain à Millas, les organisateurs ont essuyé le refus de 26 autres...
26 c’est énorme, énormissime même...
26 novilleros ont refusé de se rendre à Millas en août prochain pour y tuer deux novillos, pour s’y justifier, ou pour simplement exercer la profession à laquelle ils se destinent.
26 novilleros estiment qu’ils n’ont pas besoin de ça.

De deux choses l’une, soit l’escalafón actuel est d’une richesse sans équivalent dans toute l’histoire du toreo, et ce sont 26 figuras del toreo en puissance qui vont très prochainement figurer dans la catégorie supérieure ; soit la situation est encore bien pire que ce que nous imaginons.
26 c’est énorme. C’est d’autant plus énorme que, logiquement, la course devrait être d’une présentation et d’un trapío très raisonnables. Rien de démesuré.
C’est donc bien la caste qui leur fait peur ; la caste, le moral, et donc la mobilité, le mouvement, ils n’en veulent pas.
Ce qu’il leur faut, ce qu’ils veulent, ce à quoi ils aspirent c’est le novillo "de garantie", qui sert, tire bien la langue, qui tombe ou trébuche artistiquement, et qui a le bon goût de ne pas leur poser de problèmes. Au mieux il sert, au pire il ne dérange pas.
26 novilleros, 26 petits branleurs.

A Millas, en août prochain, ce sont Pedro Carrero, José Arévalo et Javier Jiménez qui feront le paseo. On n’ose imaginer qu’ils le feront avec plaisir ou conviction. Mais ils le feront. Honneur à eux.

Collioure 2011, un anachronisme


Collioure présentera le 16 août prochain une novillada des Héritiers de Christophe Yonnet. En plein mois d’août, au milieu des touristes, cette course sera sans doute une sorte d’anachronisme, plus sans doute que n’importe où ailleurs.
C’est de toute façon la seule justification de la Fiesta, être anachronique, faute de quoi elle disparaîtra. Et c’est sans doute la raison profonde qui fait qu’elle est peut-être en train de disparaître. 
A la réflexion, le pire, pour une telle course, n’est pas d’être anachronique au milieu des touristes, en plein mois d’août, mais de l’être au sein même du monde taurin, tous les jours de l'année.

Ce n’est pas totalement lié mais il me vient une anecdote : une histoire vraie et récente.
Un éleveur amène quelques vaches dans un village pour une tienta publique. C’est le club taurin local qui organise. Sont présents une bonne demi-douzaine d’élèves d’une école taurine invités à sortir après les matadors.
La première vache est en piste. A peine quelques instants, quelques minutes, et les élèves quittent les lieux, préférant le comptoir du bar tout proche. L’éleveur s’étonne et s’interroge de cette disparition subite. On lui expliquera, poliment, que les vaches étant "en pointes", les élèvent ne daigneront pas sortir. Et ils n’ont même pas eu la dose d’afición minimale pour rester et observer des matadors consacrés tienter des vaches "en pointes".

L’histoire est vraie, triste mais vraie.  Vous avez dit anachronisme ?

>>> Vous avez, en rubrique CAMPOS du site www.camposyruedos.com, une galerie consacrée à la novillada qui sera combattue à Collioure — on ne sait pas encore par qui...

24 juin 2011

Balada Flamenca


Ludo, Ludovic Pautier, le Ciego. Vous le connaissez, évidemment. Un trublion incontournable de la blogosphère taurine et flamenca.
Eh bien le Ciego, avec Jean Louis Duzert, photographe, est en train de nous commettre une Balada Flamenca.
Pour l’instant nous n’en savons guère plus. Mais nous y reviendrons, assurément, en temps et en heure. En attendant, et pour vous mettre l’eau à la bouche, vous cliquez sur la photo... La couverture, déjà...
Affaire à suivre, de très près, bien sûr.
¡Enhorabuena Ludo!

21 juin 2011

La censure et le sourire


À Marie-Reine, Papa et Charlie...

J’aime bien Aire-sur-l’Adour. Peut-être parce que j’y suis né, peut-être parce que j’y ai grandi, peut-être parce que j’en suis parti. Je n’étais pas à Aire dimanche pour assister à la traditionnelle corrida des fêtes. On a le droit de ne pas goûter le cartel et de ne pas être convaincu par cette promotion par la compétition des élevages français. Je n’étais donc pas à Aire dimanche mais j’ai tenu à connaître le résultat de cette course. Parce que c’était Aire, un peu chez moi quand même encore. Ne furetant plus beaucoup dernièrement sur Internet, je m’enquis donc de la chronique du journal régional Sud Ouest ne fût-ce que pour prendre le pouls de cette corrida ; cela fait longtemps que j’ai appris à lire entre les lignes souvent fleuries du chroniqueur vedette. Mais il n’y était pas lui non plus à Aire, pas plus paraît-il que son plus jeune coreligionnaire. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir ces quelques lignes au bas de la page sport du supplément du lundi, édition Pays basque : "Aficionados du Sud-Ouest, si vous ne trouvez pas dans cette page de compte rendu de la corrida des fêtes d’Aire-sur-l’Adour d’hier, ce n’est ni une erreur, ni un oubli. C’est tout simplement dû aux organisateurs de la féria, la société Caltoros, qui a refusé de nous laisser entrer aux arènes pour faire notre travail. Toutes nos excuses pour cette absence d’une reseña que nombre de nos lecteurs, qui n’ont pas pu se déplacer, attendaient."
Depuis que je suis aficionado, je ne crois pas me souvenir avoir jamais lu un tel texte dans le journal Sud Ouest et, n’hésitons pas à l’écrire, je trouve cela particulièrement lamentable d’interdire un accès presse à un journal régional pour lequel on pense ce que l’on veut de la ligne éditoriale taurine (et j’ai déjà été ici même très critique à ce sujet), mais qui a encore la démarche de rendre compte de toutes les férias de la région et des grandes férias espagnoles. A priori, et d’après ce que j’ai pu en savoir, il semblerait que l’empresa des arènes d’Aire n’ait pas apprécié une phrase publiée quelques jours auparavant dans ledit quotidien, phrase qui soulignait qu’à Aire les "arènes se vident depuis deux ans". Je ne suis pas au fait du remplissage des arènes d’Aire et je ne sais aucunement si celles-ci "se vident" réellement depuis deux ans, mais force est de constater qu’elles ont toujours eu beaucoup de mal à se remplir malgré la succession à peu près ininterrompue d’empresas depuis une trentaine d’années. Bientôt, certaines empresas en viendront même à repérer les râleurs dans les tendidos et à demander à la sécurité de les mettre dehors. Bientôt...
Comme je n’étais pas à Aire ce dimanche de censure de la presse, une amie a eu la gentillesse de m’écrire un rapide e-mail pour me tenir au courant de ce que j’avais choisi de ne pas voir.
Cette amie, c’est Marie-Reine. Marie-Reine vit à Aire et tout le monde connaît Marie-Reine à Aire. Elle connaît d’ailleurs tout le monde à Aire elle aussi. Marie-Reine assiste chaque année à quelques corridas dans le Sud-Ouest, chez elle à Aire, parfois à Mont-de-Marsan quand son emploi du temps de jeune retraitée lui laisse la possibilité de le faire. Car Marie-Reine n’a pas que les toros dans la vie mais les toros elle aime bien ça, Marie-Reine. Marie-Reine a beaucoup lu dans sa vie et continue de le faire aujourd’hui, mais je ne parierais pas qu’elle ait un jour parcouru le Popelin ou le Cossío. Trop d’autres choses à faire, et elle a bien raison. Quand elle va aux arènes, Marie-Reine est souriante (même quand elle ne va pas aux arènes d’ailleurs) et a décidé que de toute façon, aller aux arènes, c’était avant tout passer un bon moment de vie avec ses amis. Marie-Reine a raison, elle aime la vie et ses amis.
Padilla a coupé deux oreilles hier à Aire. Je crois que Marie-Reine a bien aimé ça. Marie-Reine, pour moi, c’est un peu le grand public rêvé. Pas celui qui existe dans les faits. C’est la joie et la bonne humeur, le plaisir de se délecter de ce qu’elle vit. C’est surtout affirmer ses goûts avec un sourire même face à un "puriste", comme elle écrit, c’est aussi respecter ce "puriste" quand il roumègue après un tercio de piques affligeant ou une faena de pico. Marie-Reine c’est l’anti "chut", le contraire du "ne franchis pas la ligne" ! Marie-Reine elle censure pas, elle vit en souriant !
« Cet aprem corrida à Aire...J'ai aimé le spectacle avec l'ambiance sous le soleil estival! Padilla a bien planté les banderilles et nous avons vu des mises à mort correctes et de jolies passes ....pas toujours académiques...pour les puristes! 2 oreilles pour Padilla et 1 pour Juan Bautista et 1 Milleto.
Toros autour de 500 kgs énergiques sauf le dernier...braves à la pique...picador renversé...tour de piste pour un d'entre eux. En gros après-midi sympathique pour Aire-sur-Adour
Bises  MReine »

Photographie 
Juan José Padilla à Vic en 2011 © Laurent Larrieu / www.camposyruedos.com

20 juin 2011

Vic en vrac


Vic Pentecôte 2011



Le monde est vieux, mais l’avenir sort du passé. Parole de griot chasseur de zébus... les toros de là-bas.

Ce n’est souvent qu’une question de mémoire, de souvenirs lentement accumulés, superposés les uns aux autres par strates successives, un amas, un conglomérat, un engorgement de doutes, de désagréments, de frustrations ou de contrariétés. Mais, qu’une goutte s'insinue, une goutte insensible, pernicieuse, tenace, une goutte de trop... et c’est le déversoir.
Parce que Vic c’est Vic, nous avons pris patience. Parce que Vic c’est Vic, nous nous sommes exaltés, nous avons débattu, nous avons modéré, mesuré, attendu, nous avons repoussé l’échéance, en maugréant, en espérant, en répétant à satiété, comme pour s’en convaincre ou pour se rassurer, la même incantation. Vic c’est Vic, rien d’autre à ajouter.
Pourtant, quand on y songe, Tegucigalpa c’est Tegucigalpa, Vladivostok c’est Vladivostok et Joilly-sur-Brunette c’est Joilly-sur-Brunette. La belle affaire !
L’année dernière, ça n’allait déjà pas et même la précédente, il y aurait eu à dire et on ne l’a pas dit, ou pas bien ou pas assez fort ou pas du tout.
En arrivant à la voiture, c’est revenu, soudain, comme une gifle. Pourquoi ne pas l’avoir publié ? Ce texte, pourquoi ? Parce que Vic c’est Vic ?
Justement ! Pour que Vic reste Vic...

Pentecôte 2010
Lundi 24 mai, vers 19h
Le dernier Victorino était en piste. Après les piques, nous nous sommes préparés. Les banderilles posées, le toro fixé près des planches, discrètement, nous quittons les lieux pendant que Juan Bautista marche vers la présidence.
La dame était au dernier rang. Elle devait y croire. Nous, non.
— Vous allez rater le meilleur.
— J’en doute, Madame, j’en doute même fortement.
Claquements de portières... La route... Les amis, les toros, les rires, les courses, les rires, les amis, les toros... C’est fini, on rentre... La route...
Les souvenirs se décantent toujours pendant le trajet. Les images s’entrechoquent, se lient, s’entremêlent, se dénouent, jaillissent puis s’envolent, finissent par se poser avant de s’imposer.

Samedi 22 mai, 11h
Le début est en trompe-l’œil. Un Flor de Jara bravito encaisse trois piques, et puis plus rien... ou presque... ou si peu. Les fleurs de ciste se fanent en un instant, inodores, insipides, desséchées. Un soleil de plomb, six Buendía soporifiques, trois novilleros léthargiques et c’est l'anesthésie — quasi générale — car, pendant que les somnambules rêvent de faena, les insomniaques obtiennent l’oreille du troisième novillo. Probablement un mirage dû à la chaleur.
Des virages, des coteaux. On rentre... Des coteaux, des virages... attention... panneaux, travaux, rond-point... Auch... La route...

Dimanche 23 mai, 11h
La tauromachie est-elle du matin ?
Pour la corrida concours, le palco pointe en retard. On poireaute. On chauffe. On mijote, jusqu’à se liquéfier, en attendant que sorte enfin un toro digne de l’événement. Un toro avec des cornes. Des cornes sans esquilles. Un toro de concours.
On attendra en vain. Un Fidel San Román à peine épicé, un Dolores Aguirre pour donner du goût et Antonio Barrera pour le dégoût. Aficionado, chut ! Pas de commentaires, "manja e cala". Le public change. Ici, comme partout. Il vient aux arènes comme il se rend à l’Arena Stadium, pour voir des passes. Patience, il reste les après-midi.
La route... Les champs, les ronds-points... Que sont les tercios de varas devenus ?... La route... Gimont...
Un jour, c’est certain, un type va se redresser brusquement et crier "GOOOOOOLLLL !"
— Non, Monsieur, on dit "Olé !"
— Ah, bon ! T’es sûr ?
Ce matin, ils étaient cinq ou six, là sur la gauche. Ils ont papoté pendant deux heures. Non, pas de foot, de rugby. Toute la temporada y est passée et les sept prochaines aussi. Je peux vous dire qui sera champion jusqu’en 2017, si, si. Personne n’a bronché (presque personne, ¡je, je, je!) mais qu’un aficionado fasse remarquer l’état d’une corne, le placement aléatoire d’un picador ou le comportement désinvolte d’un torero et c’est le tollé. Olé !... "T’es sûr ?"
110... Ça roule... Déviation, Léguevin... Déjà ! Demain, boulot... Non, pas demain ! Vic, je veux rester à Vic... Les courses, les rires, les amis, les toros...
Fins, racés, sans excès, vendredi soir, en arrivant aux corrales, c’étaient les plus beaux, les Escolar Gil. Au final, ce sera la course la plus homogène, vive, mobile et piquante. Les Palha et les Victorino, disparates, auront un comportement plus irrégulier. Étonnant ces trois corridas qui offrent de l'intérêt sans qu’aucun toro pourtant ne se distingue. Peut-être restera-t-il un fragment de ce volumineux Victorino, le cinquième, celui qui a rempli la piste quelques instants, promenant fièrement sa couronne veleta d’Albaserrada. Un killer. "Peut-être, mais j’en doute, Madame."
Toulouse... Déjà !... L’autoroute...
Maintenant que les images remontent et se figent, ce sont les toreros qui dominent. Quatre courageux. Mais, que sont les puyas devenues ? En arrivant, je consulterai mes notes.
Passé Toulouse, on s’arrête. Pipi, glou-glou, miam-miam.
Tiens ! Fernández Meca.
— Félicitations pour Alberto, Stéphane !
— Merci, je transmettrai.
Le soir tombe, on roule... Autoroute... Phares... Ils reviennent de la plage... Qui ça ?... Hé bien, les phares, ils reviennent de la plage... Oui, et de là-bas aussi... Du Colisée romain intergalactique... Ils sont nombreux... Très nombreux... Très, très nombreux... C’est l’art qui les attire... Bondé ! C’est beau, l’art... Bondé, c’était... Même Morante a dû apporter sa chaise. Misère !
Curieux, ce scintillant chassé-croisé de l’Afición pour Pentecôte. Plus qu'une multitude de phares, une métaphore.
Nous, c’est Vic. Définitivement. Chacun sa route.

Été 2010
Nous n’avions pas prévu d’y être mais, c’était sur le passage avant Parentis et Cenicientos, il y avait ce Yonnet qu’on avait vu au campo... Alors, comment résister ? Pensez donc, levé des couleurs sur une corrida concours 100 % made in France, plus fort que le Roquefort, plus typé que le Tariquet !
Du bleu, du blanc et du rouge... sang.
C’est en me rasseyant, à la fin des vueltas, au cinquième toro, que le temps s’est gâté. Après la pluie de trophées, devant le climat d’autosatisfaction générale, j’ai tourné le dos. Simplement, sans ostentation, j’ai attendu que ça passe. Monsieur, plus loin, avait suivi mon manège. Il en était tout offusqué. Foudroyé ! Il m’a foudroyé. C’est inadmissible, cela ne se fait pas, c’est faire injure au maestro. Donc, Monsieur, crier, manifester, vitupérer, siffler, souffler est déplaisant. Se taire est injurieux ! Que nous reste-t-il ?

Pentecôte 2011, la boucle se referme.
L’incident était oublié, Monsieur, mais brusquement je pense à vous, en me levant pour applaudir pendant que Robleño, copieusement conspué, termine son tour de piste. Un rappel sec comme un boomerang qui revient dans la figure. Certes, cette faena, généreusement notée d’un triple zéro par un spectateur excédé n’entrera pas dans les annales mais, plus que l’oreille d’un médiocre Cebada Gago, il est des coups d’épée qui se respectent. Si le silence d’un seul est une injure, que dire de l’indécence de la foule déchaînée ? Que nous reste-t-il ?
Petit à petit, c’est devenu long et pénible. Aucun commentaire sportif cette année ? Ah, si, natation. Les dames derrière causent piscine, plusieurs longueurs... crawl, puis brasse, brasse coulée... beaucoup de longueurs... Envies de noyades !
Heureusement, Tito Sandoval réveille l’arène. Son remarquable tercio de varas est certainement le moment le plus taurin de la féria. Mais au toril, le tercio de varas. Qu’importe, mouchoir bleu. Vuelta ! Encore une. Combien de vueltas posthumes en un an ? Allons, voyons, un toro de vuelta, on se le rappelle ! 'Camarito'. Non, 'Camarito' c’était avant, il y a trois ans et il n’a pas eu droit à tant de considération. Je vous laisse chercher. 'Camarito' marque la césure. Depuis, l’état d’esprit change, on devine les prémices d’une politique qui met en exergue le toro de troisième tiers. Cinq vueltas en un an. La noblesse plutôt que la bravoure. L'esthétique plutôt que le combat. La muleta plutôt que la pique. Le plaisir plutôt que le courage. Comme ailleurs, comme partout. 'Camarito' déclaré ex aequo avec un noble Victorino, idem pour le Margé et le Pagès-Mailhan, à égalité. Cette année, le prix est attribué — et quel prix ! — à un Flor de Jara hors type mais compréhensif, lors d’une course présentant essentiellement du bétail indigne, aux cornes douteuses. Basta ! Vic c’est Vic et doit le rester.
Inutile de maintenir une corrida concours dans ces conditions. Inutile de choisir certains élevages dans ces conditions.
Chaque temporada, le territoire du toro se réduit comme peau de chagrin. Bientôt, nous n’aurons plus que les yeux pour pleurer, de dépit, de colère ou de rage. Il est temps de quitter vos alvéoles, à l’abri du callejón, de déplacer ce burladero inopportun, de laisser un seul picador en piste, à l’opposé du toril, a contraquerencia, dans le terrain des braves. Il est temps de tracer les lignes à la bonne distance et d’expliquer au public que, oui, dans certains cas, elles peuvent être franchies.
Le monde des toros est vieux, mais son avenir sort d’un passé où l’aficionado était plus qu’un client. Une goutte de trop... et un monde bascule.
Parce que Vic c’est Vic.

18 juin 2011

Oh, Bonne mère !


Marseille... Ce matin, j’étais à Marseille... Marseille, son Vieux port, ses sardines qui le bouchent, ses quartiers qui jadis furent chauds, et ses parrains plus ou moins légendaires...
Marseille et son milieu, Marseille, cité radieuse, qui inspire, attise, m’attire comme un aimant, comme une amante irrésistible. Marseille, où l’on ne va pas par hasard.
Marseille, les Goudes, à l’opposé de Passedat. Les Goudes et la Baie des singes, sorte de bout de monde lunaire, où l’on se dit qu’il peut se passer des choses.
La Baie des singes, mais quels singes ? Macaques ? cercopithèques ? colobes ? ou singes hurleurs ?
Retour de Marseille. On finit toujours par quitter Marseille, même si l’on projette toujours d’y revenir. Pour l’heure, c’est l'iPhone qui m’éloigne, trop vite, de Marseille la douce, car parfois Marseille est douce, et me rappelle à la médiocrité du quotidien pour me raconter l’histoire d’un mauvais rêve.

Alors je redeviens sérieux. Bien obligé.
À compter de cette ligne, de cet instant, je redeviens sérieux. Exit les second et troisième degrés, la dérision, la mélancolie, le décalé, l'humour et les private jokes qui font généralement le quotidien de Campos y Ruedos.
Alors, de quoi s’agit-il ?
Un aficionado, un blogueur, seul et libre, a été menacé par des taurins (un organisateur et un novillero français) en raison d'un texte publié sur son blog à propos d'une féria. Menaces reçues directement par téléphone et par SMS. Classe, intelligent et fleuri dans le style, comme on peut s'y attendre.

Et ceci est grave. Les propos tenus sont graves. Les menaces proférées sont graves. Les SMS envoyés sont inadmissibles.
Nous avons bien entendu les noms, des captures d’écran, des copies de SMS et il n’y a, hélas, guère à douter de ce qui nous a été raconté.
 Pour des raisons évidentes, nous n’allons pas, ici et maintenant, dévoiler ces noms. Mais nous savons, et d'autres désormais savent... Nous verrons la suite des choses.

Ce qui est clair, c’est qu’un aficionado libre et blogueur vient d’être menacé et insulté pour ses écrits, et ceci est inacceptable, définitivement inacceptable ! Souhaitons simplement que l’histoire s'arrêtera là, et que nous n’aurons pas d’autres échos à lui donner.

Finalement, je pense que je vais repartir à Marseille très vite.
L'équipe de Campos y Ruedos

Photographie © Yannick Olivier

100 % des perdants...


4 toros de D. José Escolar Gil (pour comprendre, cliquer sur « Tous noirs y z'étaient...») de présentation desigual ont démontré une belle caste le samedi matin. Il n’y avait certes pas de quoi faire saluer le mayoral, mais deux heures durant l’intérêt fut maintenu particulièrement parce que ces toros très mal piqués et fort pitoyablement mis en suerte reprenaient leur souffle au second tercio (dont tout le monde se moque à tort) et plongeaient dans les muletas avec exigence, sans relâcher leur envie de combattre. Ne manquait juste que ce soupçon de transmission, de poder et de piquant.
A noter la rareté des pelages de ce lot d’Escolar : mis à part le troisième, z’étaient tous noirs les Escolarrr...

3 vigiles ont été nécessaires pour tenter d’extirper des gradins un jeune disciple de Michel Vautrot. Soyons gré à la municipalité vicoise et au CTV de prendre au sérieux l’importance que représente une police de proximité dans la lutte contre la délinquance, alors même qu’un quarteron de gueulards anarchisant, dont au moins un portait moustache, semble se refuser à vouloir comprendre l’urgence de ce genre de mesure.

1154 kilomètres entre « Adema » (finca de la ganadería de Palha) et Vic-Fezensac. 1154 kilomètres, c’est long, c’est très long même d’autant plus quand le voyage se fait en camion. Alors comme ils n’ont que ça à faire pendant 1154 kilomètres, les toros de Palha se préparent, se font beaux, s’épilent la base des cornes comme d’autres sirènes se font le maillot, se liment... les sabots, se coupent les poils du nez, se rasent... Bref le toro de Palha est coquet en diable. Il en fut même un pour se nommer 'Peluquito'.
A noter qu’un Palha ne maîtrisait pas parfaitement l’art du maquillage qui aurait pu lui permettre de dissimuler plus aisément un œdème sur la patte.

1 euro et un casdal auraient été offerts à un cinquantenaire nomade et vagabond qui errait dans la ville depuis quelques jours. Il était possible de le croiser à côté des chiottes publiques au derrière d’un étal de vieux papiers. D’après les informations recueillies çà et là, le CTV lui aurait proposé, dans un élan fort louable d’humanité qui réchauffe le cœur bien qu’il fît fort chaud, un couchage de secours deux heures par jour ; couchage sur lequel le pobret se vautra sans vergogne au vu et au su de tous qui n’eurent de cesse d’éviter de marcher dedans, même du pied gauche.

11 grammes ou le poids d’un appareil photo Lomo de couleur bleue, 12 tirages. Pas un de plus. Considérons dès à présent qu’au-delà d’une esthétique douteuse et d’une dénomination de barbaque porcine, l’inconvénient majeur du Lomo réside dans l’insoutenable craquement de train à crémaillère qu’il exhale entre chaque armement de photographie.
Accordons-nous cependant sur le fait qu’en matière d’armement, il vaut mieux un Lomo que les déchargements kalachnikoviens du callejón.

63 c’est le numéro de 'Generoso', un negro entrepelado de Santa Coloma rame Miura. Que tous nos lecteurs chéris se rassurent : cette fois, 'Generoso' est bien mort ! Le roublard ne viendra plus traîner sa grande carcasse dans les corrals vicois avant un bon moment. Eh oui ! En 2009, il était déjà là, novillo, déjà negro entrepelado, déjà n° 63 et finalement resté sobrero du lot de novillos. Avait-il été considéré (à juste titre) fuera de tipo ? En 2011, pour une corrida concours en première catégorie, Carlos Cancela a osé le proposer, mais Carlos Cancela n’en est pas à une audace près, le rouge lui va si bien. Oscar Chopera a osé l’acheter et le jury a osé le primer.

10 euros offerts par Bernard de Bars (32, à côté de « chez Jean-Louis » Darré), jeune homme qui se laisse pousser les cheveux depuis sept mois et la « stachmu » depuis sept jours, à un membre de l’équipe Campos y Ruedos pour s’acheter un appareil photo décent et digne de ce nom.
A noter que toute personne connaissant Bernard de Bars serait fort sympathique de lui demander de prendre contact avec la rédaction.

Récapitulons : 4, 3, 1154, 1, 11, 63 et 10. Perdu ! Vic 2011, 100 % des perdants ont tenté leur chance...

Photographies Un "Escolar Gil" à Vic en 2011, et la bonne humeur en banderole à Vic l'année dernière © Laurent Larrieu / Camposyruedos.com.

17 juin 2011

Comme le chai de mon grand-père


A "los de Broussez", et les quelques 70 autres qui ont chanté... en gascon et en castillan.

Partout autour, il y a cette odeur de bon pain tout juste sorti du four. Les collines, les bosquets et les baraques à pigeonniers, le vieux bois, la vieille pierre, la terre et le cuir, et puis au fond, la vieille grange pleine de foin et le soleil par dessus, qui pèse méchamment. Ici, c'est la Gascogne, avec l'accent qui roule comme un maillet sur le quillet, le bras épais et l'idée tranchée. Ici, c'est Vic, juste Vic, simplement Vic, et tout est dit.

Ici, pour peu qu'on y débusque une paire de zozos accoudés à un zinc et qui auraient eu la mauvaise idée d'être des copains que vous n'avez pas vus depuis un an, alors, ça peut être une façon d'être heureux aussi car, ici, à Vic, chaque année, depuis mille ans, le dimanche à midi, on chante en gascon et en castillan le bonheur de nos retrouvailles.
Un fond de rouge sur une tranche de cochon noir de Bigorre, trois conneries à raconter, toujours, et si en plus vous aimez les toros, vous y serez un homme heureux.

Et puis voilà, les années passent et les hommes trépassent. La fête reste belle, c'est sûr, et l'armagnac puissamment doucereux, vrai de vrai, le Gers, terre de traditions, pour sûr, milediou !, mais cette fois-ci il a manqué du monde, et un peu quelque chose, aussi. Et nous l'avons tous bien compris. Oh, bien sûr, les nuits des juins gascons ont toujours ce parfum rustique et enchanteur où l'on raconte les Braves d'hier et de demain, mais quelque chose n'a pas brûlé, et peut-être ne brûlera plus, je le sais désormais. Pas parce que demain ne sera jamais hier, mais parce que les durs d'autrefois n'ont plus envie de taper fort sur la table, et qu'ils rêveraient peut-être un peu à d'autres délices auxquels on ne les a jamais trop conviés jusque-là. Pas faux, et même que ça ne m'étonnerait pas. Les solides gaillards d'avant ne se défendent plus de frisés coups de gueule qu'on ne voyait qu'ici ; ils préfèrent finalement ces silences nouveaux et cette politesse à outrance qu'on ne leur connaissait pas. Si ça se trouve, le vin râpeux les fait tousser, maintenant. Eux, les Vicois ! Pire, je crains qu'ils ne comprennent plus rien au spectacle. Il a manqué quelque chose, c'est sûr, ce quelque chose qui n'a pas brûlé et qui ne brûlera peut-être plus... un peu comme le "chai de mon grand-père". Les années passent et les hommes trépassent. Avec eux, le temps du savoir, du savoir-faire, de l'audace, des grosses gueulantes et des fraternités indispensables pour tenir le trois-mâts dans la tempête. Un seul être vous manque, et puis voilà...
Du coup, les vessies, les lanternes, les faux braves, les mandrins, les malins, les coquins, les tricheurs, les maladroits, les mauvais viseurs, les tristounes et les simplement gentillets, jusqu'aux rasés de près à l'écoeurement, les malvenus, les trop gros, les trop petits, les mal baisés, les mal branlés, et même les hommes en noir de la « Securitate » se sont invités. Tous étaient là, si nombreux ! Trop. Tant pis.
Nous autres, on s'est séparés, tous frères, en se promettant une année prochaine, et l'on s'y retrouvera en frères, c'est sûr, comme depuis mille ans, pour le bon rouge languedocien, le cochon noir de Bigorre et les copains de Cerbère à Biriatou. Mais le bonheur des retrouvailles, que l'on chantait en gascon et en castillan, suffira-t-il encore l'année d'après, et celle d'encore après, et toutes les autres aussi, si les VRAIS toros de Vic et de son peuple de RUDES gueulards n'étaient pas de retour bientôt ? Je veux dire très bientôt, en fait...

16 juin 2011

Et j'ai crié, crié-é !


Des conneries du style : PICADORS C'EST QUAND VOUS VOULEZ ! — BOOOUUUHH ! — ¡EL QUITE! — TORO INDIGNE D'UNE CONCOURS ! — ¡FUERA! — ¡TORO CON FUNDAS! — ¡CAMBIO! — ¡NO A LAS FUNDAS! — PASSE LA LIGNE ! et, avec la force du désespoir… ¡INDULTOOOOO!

Ci-dessous Remplacer « Aline » (cette coquine) par « Afición » (cette conne) et s'attarder un moment sur les lèvres de Christophe… Énooorme !

15 juin 2011

« Les Compliqués »


Comédie en une scène et un acte. L’action se passe à Vic-Fezensac, depuis trois jours. Tout le monde est bourré et sale, surtout les invités à la tribune officielle. Marianne et Dorine vident des bières dans les écolobelets. Arrivent Tartuffe et Arnolphe picolant du rosé.

MARIANNE - Ne vous fâchez pas mon père de ce que céans je veux vous dire... C’est... compliqué.

TARTUFFE - Eh bien quoi, parlez Marianne à la fin ! Que diable, changez de braquet !

DORINE - Compliqué de rester assis douze heures tout serré dans un énorme relent unanime de magret-frites ?

ORGON - Compliqué de se garer, de repartir, de se loger, de se nourrir ?

MARIANNE - Non, ça c’est cher. Non, "compliqués" mon bon père.

ARNOLPHE - Compliqué de retrouver la voiture, de ne pas marcher dans le vomi, de plaire aux vigiles ?

MARIANNE - Non, vous dis-je ! Compliqués !... Les toros ! Ils étaient compliqués ! La presse l'écrit et le vend !

ORGON - Mais, expliquez-vous écervelée, et ne nous rabâchez point ce « compliqué » assommant !

MARIANNE - La revue de presse en ce mardi de la Récupération est catégorique, mon père, le mot en vogue est : « compliqué ». Tout le monde le dit. Dès qu’ils tombaient entre les pattes de Padilla, Miletto, Bolívar, Robleño, Joselillo et autres Lescarret... ils étaient compliqués.

Entrent Fanchou suivi d'Orgon, avec du blanc limé.

TARTUFFE - Et je vous dis, moi, que vous êtes bien sotte. La terminologie est faste en tauromachie. Maître Fanchou, parlez, soyez sincère.

FANCHOU (énervé) - Si fait, Mademoiselle, souffrez que je vous tertouille. Dès qu’un toro se décompose, s’avise, développe du genio, tourne au bronco, OU vire au bœuf immobile CAR dézingué à la pique... On dit là-bas qu’il est... « compliqué ». Or, trop souvent, quand le toro est « compliqué », le torero devient... « ennuyeux »... Et ils sont parfois plusieurs.

MARIANNE (s’adressant à son père) - Ne vous alcourroucez pas mon gentil papa mais, à la fin, il m’embrouille.

TARTUFFE - Continuez Fanchou, développez je vous prie cette noble pensée.

FANCHOU (assez rouge) - Car, alors, le torero va s’acharner durant des heures (trois jours en fait) à extirper une passe après l’autre à cette mule arrêtée. Car il croit devoir arracher, au prix d’efforts inhumains, le minimum admis de passes peu honnêtes lui permettant d’éviter l’engueulade analphabête.

MARIANNE - Au lieu d’abattre la bête ?

FANCHOU (tout rouge) - Si fait. Il le devrait comme le fit le Fundi ce lundi.

ORGON - Et si d’aventure l’animal toujours s’avance ?

FANCHOU (violet) - Si fait. Il menace alors de bouffer le torero et, devant ce danger, celui-ci se replace. Evitant ainsi de se faire déborder à chacune des passes.

MARIANNE - Mais en s’éloignant à perpète on pourrait penser qu’à la fin il se barre ?

DORINE - Et voilà tant pourquoi, Marianne, d’aucuns s’ennuient dans l’étagère... quand le torero veut par trop... séduire le populaire.

Bon anniversaire Titi !
Mario 'Juan Bautista Poquelin' Tisné

Soissantan !


(... et toujours militant.)

Salut à toi ô le Hautbois !
Salut à toi le Dacquois !
Salut à toi visiteur Vicois !

Salut à toi l'sexagénaire !
Salut à toi Landais sanguinaire !
Salut à toi pour ton anniversaire !

Salut à toi le président !
Salut à toi aficionado gitan ! 
Salut à toi de temps en temps !

Salut à toi currista romantique !
Salut à toi faraón bétique !
Salut à toi l'mélancolique !

Photographie sans paroles (LVIII)



14 juin 2011

Troisième service (avec du rab)


Poussé par certains, encouragé par d'autres, je ressers au lecteur un post par deux fois retiré de sous ses yeux un mois auparavant. Un post présenté tel qu'il fut publié lors du second service*, certes, mais avec un supplément de VRAI et de FAUX — plus quelques annotations.
* Pour obtenir des explications, lire les commentaires sur « Cambio de toro ».

Pressentiments
Ça y est, je viens de réserver mes deux places de « spectacles » (sic) pour la prochaine féria vicoise. Jusqu'ici, n'ayant jamais été abonné, j'avais toujours téléphoné. Mais parce que je me suis décidé un dimanche, Internet m'a (très bien) rendu service. Et puis, seulement une fois le mail de confirmation reçu — un peu comme si ces deux courses matinales s'étaient imposées à moi en me dispensant de toute interrogation préalable, avec toutefois une hésitation pour la course du dimanche matin en raison de la présence de « toros con fundas » —, une fois le mail de confirmation reçu, disais-je, j'ai commencé à avoir le pressentiment :

1) qu'il ne fera pas beau vu que, si ma mémoire ne me trahit pas, le soleil était de la partie lors des trois précédentes éditions ; FAUX, j'ai même pris un coup de soleil sur le pif et, à voir la bobine des ami-e-s, je peux vous garantir que je n'étais pas le seul.

2) que de trop nombreuses cornes (et notamment celles qui auront connu les funestes fundas) seront dans un état douteux ; VRAI. Et un poireau (merci Benito !) Fuente Ymbro, un ! Etc.

3) que la récente inscription de la corrida au PCI français sera fêtée par l'OCT de la plus grandiloquente et ringarde des manières, et ce dès le samedi matin ; FAUX, ouf ! En revanche, on a une nouvelle fois eu droit à l'hymne occitan, que, soit dit en passant, personne n'a chanté.

4) qu'il sera décidé, durant les trois jours, d'utiliser la pique « française » — française ET inutile puisque, manipulée par les mêmes mains « expertes », elle occasionnera au moins autant de dégâts que celle, déjà « frauduleuse » (si, si), qu'elle remplacera ! ; VRAI, ou quand les picadors semblent ne s'être jamais autant régalés — probablement une illusion.

5) que l'on risque bien de voir sortir du toril des animaux avec leurs affreuses boucles d'identification ; FAUX.

6) que le toro le plus « moderne » [épargné au premier tiers et imitant bêtement l'essuie-glace au dernier (cf. le Victorino de 2009)] remportera la corrida concours ; FAUX, mais c'est 'Desierto' et non 'Generoso' qui aurait dû remporter le prix — vous avez dit 'Généreux' ?

7) que tous les toros seront longuement piqués (en arrière) et carioqués dès la première rencontre, dimanche matin inclus ; FAUX, et je dis FAUX par souci d'honnêteté puisque je ne me suis pas senti obligé de décortiquer chacune de ces premières piques... mais toutes furent bien portées partout sauf dans le morrillo !

8) que pour un oui ou pour un non des oreilles vont tomber, des mayorales être invités à saluer, des toros « tourner », des présidents accorder des changements de tiers et envoyer la musique pour saper (et éterniser) une faena juste pas trop mal engagée ; VRAI, changements de tiers inclus car, personnellement, jamais je n'aurais changé si rapidement le tiers après les deux « assassinats » en varas prémédités par Mora à ses deux Aguirre.

9) que le stand de Qui-Vous-Savez encombrera une année supplémentaire le parvis des arènes ; FAUX, il était cette fois-ci à droite à côté des WC — ceci dit, le parvis était encombré d'autres stands, ce qui m'irrite passablement sans que je puisse raisonnablement l'expliquer.

10) qu'un toro sera gracié — par pure curiosité, j'aimerais pouvoir connaître la proportion de personnes présentes sur les tendidos avec, en tête, le secret espoir que cela se produise ; FAUX, mais quelle déception quand même ! Quant au gros du public, mejor ni hablar.

11) que je vais encore me sentir bien seul sur mon bloc de béton, et vivre, de ce fait et à coup sûr, de grands moments de solitude — heureusement, le soir, avec les ami-e-s... ; FAUX, car, une fois n'est pas coutume, l'affluence au Soleil m'aura permis de descendre et de me rapprocher des ami-e-s sans devoir attendre la nuit tombée.

12) que la présentation de quelques-uns des toros participant à la concours ne correspondra pas à celle que l'on est en droit d'attendre pour une telle course ; VRAI. Et une sardine Albaserrada, une ! Et un cerf Buendía (quelle armure affreuse !), un ! Et...

13) que les Dolores Aguirre vont me décevoir... VRAI (soupir).

J'espère me tromper. Je me suis manifestement trompé (5 VRAI sur 13) et, franchement, je ne vois vraiment plus pourquoi les Vicois se sont étranglés un mois auparavant...

Image Une corne dans les corrals vicois © José 'JotaC' Angulo

10 juin 2011

Peinture fraîche



Il y a quelques années de cela, la municipalité de Mont-de-Marsan entreprit de rafraîchir ses arènes du Plumaçon. Une odeur de peinture planait sur une bonne partie de la ville ; une étrange rumeur ne tarda pas à s'y répandre : l'escalier numéro 6 avait été “oublié” ! Tous auraient été grattés et peints, sauf lui, le “6”. Les ouvriers ne l'auraient même pas approché — il se disait que leurs jambes flageolaient, que leurs fronts suaient, leurs mains aussi —, et qu'ils seraient passés du “5” au “7” via le parvis. Personne ne savait, mais tout le Moun devisait ; jusqu'au jour où Madeleine arriva, et où l'on put constater de visu le piteux état de l'escalier banni. La rumeur devint polémique ; elle enfla et s'invita partout, pourrissant la vie politique de la douce préfecture landaise. Bien des années plus tard, usé de garder le secret, épuisé de ne pas oser s'en libérer, un des peintres craqua. Aux enquêteurs qui ne l'interrogèrent même pas, il évoqua la présence de petits paquets blancs et mousseux (“comme de la bave”), de sons brefs et clairs (“comme des sabots”), de certains plus sourds et profonds (“comme des mugissements”), et... d'odeurs... C'est alors qu'il baissa la tête ; ses épaules tressautèrent — un sanglot secouait sa poitrine. Le visage défait et les yeux rougis, comme effrayé par l'aveu à venir, il finit par laisser échapper entre ses lèvres violacées : “Ça sent le Toro !”

Lien Le tout nouveau tout beau site (et blog) de la Peña Escalier 6 de Mont-de-Marsan : http://www.escalier6.com/. Chapeau !

>>> Dimanche 12 juin à Vic, au pied de la statue près des arènes, retrouvez la bande (pas triste) de la Peña Escalier 6 pour le traditionnel PATME...

09 juin 2011

Ce matin blême et gris


Le ciel pesait. Rien ne frémissait que nous-mêmes, vacillants. On eût dit mille petites flammes de ces bougies qui veillent les morts ; mille feux inconstants qui font des flots au mur pour apaiser le vide. Deux rayons de soleil ont percé. L’aigu cinglant des deux yeux d’un curé en soutane, le visage était blême et gris, maladif ; et le tout se penchait sur le défunt comme pour l’étouffer, l’ombre d’une heure grave s’étirait au plafond. Hier, José Muñoz était mort. Sur le moment, et il est exagérément honteux de l’écrire, ce n’est pas quelque chose de difficile à encaisser. Il a chuté, ils l’ont emporté à l’infirmerie, il y est mort. Voilà. On l’a appris sur la route. Il est mort. On en a parlé, c’est sûr, et puis on est allé manger, et puis on est allé dormir.
Et on revient demain. Demain, c’est ce matin couvert d’une soutane, ce matin blême et gris, maladif, où le répit est un espoir après la nuit de bruit, après les mauvais songes et les hontes cachées.
Hier, José Muñoz était mort. José Muñoz était mort à l’imparfait car la mort est un temps long mais qui surgit de nulle part sous le masque tranchant, brusque et définitif du passé simple. Il était mort et cela continuait ce matin blême et gris.
Ils ont pénétré le lieu comme s’il se fût agi de n’importe quelle autre corrida. Ils étaient six comme partout. Avaient-ils reniflé l’haleine putride de ce matin blême et gris vautré sur nous ? Avaient-ils conclu quelconque pacte odieux avec cette ombre ténébreuse, avec le diable, avec Ivan le Terrible, avec Keyser Söze ?
Chaque vingt minutes fut une éternité nerveuse traversée à la vitesse de la lumière. Le sable souffrait, le bois souffrait, la porte du toril souffrait, les drapeaux fichés en haut de la plaza poussaient des cris aigus et lancinants, les mouches avaient foutu le camp, les rares oiseaux qui survolaient l’arène déféquaient, silencieux et fuyards ; le jour s’était levé, tout le monde le regrettait.
Il n’était plus question de trapío, de tamaño, d’encaste, de caste, de bravoure, de genio, de sentido, de mal au dos. Il était question d’être là, une fois de plus, comme hier, et d’assister, impuissant mais frémissant, au récital de la peur. Les 6 toros de Rocío de la Cámara de ce matin blême et gris faisaient peur car ils n’étaient, chacun et tous pareil, qu’une masse brute de violence. Rien ne s’exprimait sur eux, hors d’eux et en eux. La bouche était close, le regard oublié entre deux cactus andalous, les oreilles figées et pourtant l’on aurait juré qu’ils réfléchissaient sur la manière la plus efficace et la plus violente d’envoyer les chevaux (de Fontecha !) dans le callejón, voire directement à l’abattoir. On aurait mis une main au feu que chacun de leurs pas était calculé, pensé, élaboré.
Ce fut une matinée tragique sans mort (si ce n’est celle des toros), sans larme. Le matin blême et gris s’achevait, le répit n’était plus un espoir mais un présent palpable, six éternités venaient de s’écouler et nous étions toujours mortels.

Dessin Les Rocío de la Cámara vus par Jérôme 'El Batacazo' Pradet © Camposyruedos.com

Toros y peones


En 1995, sous le titre « La Lidia » et la direction de Joaquín Vidal, El País publia une série de quarante-deux planches illustrées passant en revue l'histoire de la tauromachie et tout ce qui va avec : toros, arte de torear, lidia, et cætera.
Pour la planche intitulée « Primer Tercio », le regretté critique taurin rédigea un texte aussi rare que nécessaire dans lequel il se désolait, notamment, de l'abandon par les peones du toreo « à une main ».

Traduction... "libre" « Le toro sort avec la force et la vigueur propres à sa caste, et la cuadrilla se doit de le fixer dans le terrain de la lidia. Les trois peones l'appellent successivement depuis leur burladero, et le troisième l'oblige à se retourner. Le peón de brega, qui s'est avancé jusqu'à la raie, arrête le toro à l'aide de sa cape, le cite à une main et conduit sa charge en lui faisant faire une première volte-face.
A ce moment précis, le président ordonne l'entrée des picadors. Le peón embarque le toro dans des séries de capotazos larges et précis, puis change sa cape de main dans le dos et guide le toro jusqu'aux planches à la pointe de la cape et à une main. Déjà présent, le matador intercepte le toro avant qu'il ne remate, et le "véronique" jusqu'au centre du ruedo. Cette manière de faire a un objectif : en amenant ainsi le toro au centre, on laisse le champ libre au picador occupé à prendre place. Cet ordre dans la lidia, "étalonné" durant des siècles, quelques présidents irresponsables l'ont remis en cause au cours des années 1970 en décidant de laisser entrer les picadors une fois la prestation à la cape du matador terminée. Et les conséquences négatives ne se sont pas fait attendre : les peones ont cessé de toréer à une main ; les matadors sont devenus les seuls à faire des passes de cape lors du tercio, et la lidia s'est interrompue jusqu'à ce que les picadors soient prêts à intervenir. Les cuadrillas occupant tout ce temps mort à amener le toro vers un burladero éloigné, puis à le ramener...
Pour les cuadrillas, c'est devenu beaucoup plus confortable : aucun peón n'exécute plus cette émouvante suerte consistant à fixer et à faire courir les toros à une main ; suerte qui permettait, en outre, de pouvoir apprécier ses aptitudes — sans nul doute une avancée professionnelle de la corporation des peones qui évitent ainsi de faire trop d'efforts. Il est bien évident que, par la suite, ils gaspillent leurs forces à crier au matador durant la faena : "¡Tocále, pónsela, vámonos!", qui ne sont rien d'autres que les canons de la nouvelle tauromachie. »
Joaquín Vidal

Image Depuis le callejón (...), un toro de D. José Escolar Gil à Vic en 2010 © François Bruschet